Cyril, Tibotine et Axel marchent dans un couloir.
Cyril, à Tibotine : Mais comment tu l’avais rencontrée au fait ?
Tibotine : Ça s’est fait en deux fois. La première fois, elle avait montré tout l’étendue de son talent avec des bonnes répliques et un clin d’œil à Cyrano de Bergerac. La seconde fois, je me suis faite agresser par…
Axel, tapotant : On peut éviter ce sujet s’il vous plait ? J’aime pas parler d’elle.
Ils marchent dans le hall.
Cyril : Encore sous le choc ? Je te jure que si je la croise, avec toute ma prestance et mon humour, je lui ferai regretter de…
Dickie, tête basse comme pour ne pas être aperçue, passe à ce moment-là devant eux.
Cyril : Mais quand on parle du loup ! Eh Dickie !
Axel : C-cyril, non !
Cyril, attrapant Dickie par l’épaule qui ne s’était pas arrêtée : Hop hop hop ! Fais pas genre tu m’as pas entendu !
Dickie se retourne en gardant les yeux baissés.
Dickie : Quoi ?
Cyril : Ooooh ! On fait sa tête de chien battu ? Faut pas faire la gueule Médor ! C’est toujours mieux que de montrer les crocs, mais ça n’empêche pas que t’es une sacré bâtarde !
Dickie : Ok. Tu veux la venger, c’est ça ? Mets-moi tout ce que tu veux, j’en ai plus rien à faire. Je l’ouvrirai même pas.
Cyril : Vrai ? Juré ?
Dickie opine brièvement de la tête.
Cyril : Ça va être possible ça ?
Dickie : Ça va être possible.
Générique.
Cyril, faisant mine de s’échauffer : Wouh ! Ça va être l’un des plus beaux jours de ma vie ! [il arrête] Alors, ton amie [il montre Tibotine], enfin ex-amie, c’était avant que tu la déçoives énormément rappelle-toi, m’a dit que tu avais un faible pour Cyrano de Bergerac. Je sais que tu me prends pour un imbécile, mais figure-toi que je connais, il y en a de la culture là-dedans. Voici donc les différentes fins que tu pourras connaître sous mon verbe, à la manière de Rostand. Et c’est tout !
Cyril se retourne vers Axel, et lui fait un signe avec le visage qu’elle ne comprend pas.
Cyril : La suite ! J’ai dit « c’est tout » !
Axel : Ah. « Mais… »
Cyril : Ah non ! Je n’ai pas encore commencé jeune homme !
Car on pourrait trouver pour cette fille bien des fins en somme.
En variant le ton, -par exemple, tenez :
Réaliste : Dickie, de son orgueil trop enflée,
Demanda au sieur Cyril qu’il l’achevasse !
Suicidaire : Dickie, un peu à la masse,
Veut voir si de faire une longue phrase Cyril était cap !
Descriptif : C’est un roc, c’est un pic, c’est un cap
Pas de doute, Dickie, Cyril l’en – que vois-je ?
Tout un auditoire qui emménage !
Messieurs, dames, pour vous en remercier
De croustillantes fins je m’en vais inventer !
Hum, tragique : à bout de force devant Cyril
Et préférant la mort à l’exil
Dickie sort un flingue et se tue
Car sa fierté et son orgueil n’en pouvait plus.
Vous allez me trouver pessimiste
Mais j’ai pourtant bien fouillé la liste !
Amicale : Tibotine et Axel
Devant la violence des mots des Cyril se rappellent
De doux moments avec Dickie
Et vont consoler leur amie.
Mais croyez-vous vraiment qu’elles accepteront
De câliner une telle abomination ?
Romantique : Cyril l’embrasse
Dans un doux baiser fugace
Mais là c’est à vous que je songe, mes amis
Car aussitôt c’est tout l’auditoire qui vomit !
Fantastique : Cyril en appelle à Dieu qui arrive et la bénit
Y arrivera-t-il ? Son âme est si pourrie !
La cruauté, la froideur de son monstre sans cœur
Ferait douter même des pouvoirs de Notre Seigneur !
Ce paragraphe était réservé aux croyants.
Mais bon Dickie, comme je ne suis pas bien méchant.
Je te laisse choisir la fin la moins triste.
Ne viens pas dire après que je suis égoïste.
Dickie, après avoir longuement hésité dans le silence :
Cyril, vraiment ton attention me touche
Et à ta demande, j’ouvrirai donc la bouche.
Je t’apporte ainsi mon ultime décision :
Je choisis une fin qui ne contient pas ton prénom.
Grand silence.
Cyril : Ben par exemple la premi… ou alors la trois… euh…
Tout le monde commence à chuchoter en tout sens.
-Le romantique il l’embrasse donc c’est mort.
-Il a pas dit que c’était lui qui appelait Dieu ?
-Je suis sûr qu’il a dit qu’il l’achèverait.
-« à bout de force devant Cyril », je m’en souviens il l’a dit.
Etc.
Cyril, cessant de jouer le jeu et de chercher à rimer : [à la foule] Stop ! [à Dickie] Je crois me rappeler que tu avais promis ! …Me rappeler que tu avais promis que tu te tairais !! Est-ce que c’est ça ton sens de l’honneur, Dickie !?
Dickie, hautaine et lentement, rimant avec les phrases précédentes de Cyril :
Mais n’avais-tu pas promis que c’est de moi que tu parlerais ?
À moins que ta mémoire soit aussi courte que ta modestie.
Eclat de rire de la foule.
Dickie, au milieu des rires, chuchotant à Cyril : Comme quoi on n’assiste pas forcément à la fin de celui qu’on attendait.
Tibotine : Dickie ! Comment as-tu pu…
Dickie : J’ai craqué. Désolée.
Toute la foule se disperse. Soudain, on commence à entendre « toc… toc… ». Dickie prend peur.
Axel, tapotant : Alors comme ça t’es incurable, hein ?
Dickie : Ouais. Je m’excuse pour la dernière fois, pour Tibotine et toi. J’ai été une peau de vache.
Axel : Sûr.
Dickie : C’est oublié ?
Axel : Crève. C’est gravé bien clairement, là [elle montre son cerveau]. « Dickie peut être une enfoirée de première si elle veut. Mesure de sécurité : si elle recommence, prière de lui briser la nuque ».
Dickie : Ouais. Il est probable que ça me calme.
Elles rigolent.
Tibotine : Cyril ! Dis quelque chose !
Cyril : … Je me suis fait détruire ! Humilié ! Pauvre de moi ! C’est une légende qui s’écroule ! Pauvre de moi ! Moi, si parfait !
Dickie : Ouais Cyril, effectivement t’es parfait. Mais seulement quand tu…
Tibotine, la coupant : Dickie ! Qu’est-ce que tu vas lui sortir comme horreur ! Tu crois pas que ça lui a suffit !
Dickie : Pardon pardon !
Tibotine : Essaye de lui remonter le moral plutôt !
Axel : C’est bien la seule chose qu’on puisse lui remonter, parce que sa côte de popularité, bing !
Elle éclate de rire avec Dickie.
Dickie, riant avec Axel : C’est même plus une pente raide, c’est carrément une chute !
Tibotine : Eh ! Dickie, si tu veux être de retour avec nous, tu arrêtes de dire que des méchancetés !
Dickie : Ah non, nuance, j’en dis des encore pires, mais j’ai appris à en accepter les conséquences. Regarde par exemple : Axel, je suis contente d’être redevenue ton amie, tu pourras à nouveau terminer une phrase sans mourir d’épuisement avant la fin.
Noir.
Dickie : Axel !! Lâche mon cou ! [étranglée] Axeeeel !
Générique de fin.